mercredi 29 octobre 2014

Critique musicale: Dakiniz - Spontaneous Human Combustion With French Fries (2014)



Il était une fois trois petits cochons…

Une simple visite rendue à la page d’accueil du site officiel de Dakiniz suffit à nous renseigner sur l’origine de ce trio musical venu de Paris. En effet, nous y apprenons sans détour qu’un jour venu trois petits cochons prirent leur destin en main et, laissant derrière eux leur lointaine contrée, se décidèrent à aller chercher fortune en direction de la capitale. Arrivés sous le ciel de Paris, et dans l’optique de voir couronnée de succès leur  nouvelle entreprise, tous trois se rebaptisèrent et s’armèrent d’instruments de musique.  Ainsi, le guitariste et chanteur choisit de s’appeler Matthieu, le batteur Pierre tandis que le prénom d’Alex fut choisi par le bassiste. Le trio quant à lui répondrait désormais au doux nom de Dakiniz[1]

Bien plus sérieusement, c’est à Montpellier qu’il faut chercher le premier soubresaut de ce qui, plus tard, deviendra le trio de Noise-Rock Dakiniz. C’est en effet au cœur de la capitale héraultaise que Pierre et Matthieu, deux amis se connaissant depuis l’époque du collège, et plus précisément la classe de 4e et le cours de latin, venus y poursuivent leurs études décident d’y fonder un groupe, nouveau prolongement d’une première expérience remontant à l’époque du lycée. Les deux compères évoluent à l’époque au sein d’un groupe local dénommé The Opium, au son Garage-Rock.
The Opium écume alors bars, rassemblement de motards, fêtes et manifestations étudiantes, tout en assurant des prestations dans toutes les salles possibles, petites comme grandes, avec, entre autres, un passage au Rockstore, toujours à Montpellier.

Matthieu et Pierre prendront ensuite la décision de rejoindre Paris, d’y « monter » comme on dit souvent. Leur but? Tenter de vivre « le rêve américain », de vivre « le leur » avant tout et d’espérer le voir se concrétiser pour de bon.

Désireux d’édifier un nouveau projet musical, et à la recherche d’un bassiste,  le chanteur et le batteur font vite paraitre l’annonce suivante :

"Groupe à fleur de peau cherche bassiste attentionné".

Alex, qui auparavant officié en tant que bassiste au sein du groupe parisien Mushroom Monkeys, se laissera tenter…En cette année 2012 le projet labélisé « Dakiniz » prenait forme. Le trio nouvellement formé, l’aventure pouvait commencer et les choses sérieuses débuter !
Dakiniz lui-même se définit comme suit :

DAKINIZ [dakiniz], n. m. : trio musical parisien au noisy rock pulpeux, viril et abrasif. La rencontre charmante entre Fugazi, McLusky, Luis Mariano et le TER Montauban – Carcassonne.

Définition simple et claire aux perspectives musicales aussi étonnantes qu’attrayantes, à en juger par la somme des quelques influences citées !

La première concrétisation discographique de ce jeune groupe fut un premier EP quatre titres éponyme publié le 15 janvier de l’année suivante[2].

D’Oriental Lily Flower, Be My Guy, All Men Fall et Former Friends, les quatre titres que renferme Dakiniz, on peut avant tout retenir un premier ensemble de titre s’inscrivant pleinement dans les canons du genre Noise-Rock. Les titres sont plutôt brefs et s’articulent en majorité autour d’une rythmique lourde imprimée par des gimmicks de batterie très présents sur l’ensemble de ces titres. La guitare électrique se signale par un ensemble de riff puissants et rageurs, parfait écrin dans lequel un chant mixé en avant, et débridé, souvent, vient prendre place. La basse, quoi que pouvant, à la première écoute, semblait en retrait tire son épingle du jeu en proposant des lignes à la fois simples, accrocheuses et massives et délivre ainsi un parfait contrepoint au jeu de batterie (citons les exemples des titres  Be My Guy et  All Men Fall) Si Dakiniz fait l’apanage de la puissance et des décibels, l’ensemble ne se dépare nullement d’une certaine finesse, cette dernière pouvant être perceptible sur un titre comme Be My Guy et se révéler plus encore sur la production de l’ensemble du disque. En effet, Le Noise-Rock proposé par le trio est nimbé d’une production plutôt équilibrée qui concorde à l’homogénéité de l’ensemble. Sur ce premier EP  Dakiniz capte et nous révèle à sa manière des ambiances, grâce au titre Former Friends notamment, pour une conclusion dont la spontanéité se révèle une parfaite introduction à Spontaneous Human Combustion With French Fries, seconde production du trio.

Dix minutes, quatre titres.
C’est le 1er juin 2014 que Matthieu, Pierre et Alex ont fait paraitre Spontaneous Human Combustion With French Fries[3], leur second maxi quatre titres.
Sur la réalisation et la conception de celui-ci, Matthieu confiera :

« Le nouvel EP c'est vraiment un travail de groupe, chacun a véritablement apporté sa pierre à l'édifice, son univers, ses envies, ses influences, on a sculpté les 4 morceaux en essayant de créer une atmosphère qui nous ressemble. C'est brut, sûrement un peu sale mais c'est du sincère ! »

Ce travail à six mains fut placé sous la houlette du producteur Sa Sainteté Laurent Ciron qui s’est entre autres illustré pour son travail aux cotés de groupes comme Dogs, The Jones ou Architekt of Sound. C’est, dit-on, dans la cuisine de ce dernier que Spontaneous Human Combustion With French Fries, fut enregistré.

Le travail de production semble cette fois avoir pris une orientation quelque peu différente. En effet, si la production de Dakiniz se signalait par son coté légèrement calibré, un mixage soigné des différentes pistes instrumentales et sa petite touche de finesse, celle de son prédécesseur se veut au contraire préservatrice de l’énergie intrinsèque des performances « live » du groupe. Primauté fut donc accordée au mixage d’un  son émanant presque exclusivement de prises directes.
Le résultat donne à découvrir un son encore plus brut et spontané que précédemment, très proche des productions de type Garage-Rock.

I Will Probably Sell My Organs On Facebook, la plage titulaire, s’ouvre sur une introduction de guitare électrique au gimmick simple et accrocheur, avant que, très vite, chant rageur et batterie martiale n’en viennent à occuper l’espace sur un rythme effréné. Dans la seconde moitié du morceau une ligne de basse lourde se fait remarquer. Une entrée en matière aussi brève que puissante (une durée maximale d’à peine deux minutes) où l’apparente légèreté du gimmick de guitare et la ligne de basse contrastent assez efficacement avec la puissance des percussions et du chant. Le tout se voit agrémenté d’une petite touche d’humour.

Daddy Is A Girl arrive ensuite. Ce titre se voit en premier lieu porté par un chant très en avant dès l’entame. La batterie et la basse semblent ici se contenter du second plan, accompagnant plus volontiers le chant. Un titre pourvu d’un pont instrumental aussi bref que rageur. Par ce morceau, la spontanéité du travail du groupe trouve tout son sens. On a en effet l’impression de découvrir ce morceau en pleine ébauche, encore au stade d’embryon.

Chant toujours aussi rageur et tempo très rapide pour laisser se dérouler Same Face Same Process, la composition suivante. La basse se fait plus présente et audible encore qu’auparavant. La batterie assure un gimmick dantesque, quoi que plus en retrait sur ce mixage. Six cordes, basse et batterie assurent, au milieu du titre, une partie instrumentale quelque peu mouvante.

C’est sur Life Is Banana que se referme Spontaneous Human Combustion With French Fries.  Cette composition se voit pourvue d’un sympathique gimmick de basse. La six cordes délivre toujours un riff principal massif, simple mais accrocheur. Le chant, lui aussi, s’inscrit dans la droite ligne des prestations délivrées précédemment. Life Is Banana est aussi pourvue d’un sample. A l’ambiance « Honky Tonk »  de Former Friends succède une clameur simienne…

« C'est brut, sûrement un peu sale mais c'est du sincère ! »
Matthieu

****

Avec Spontaneous Human Combustion With French Fries Dakiniz nous livre assurément un concentré de Noise-Rock. Ils ne perdent pas leur temps, vont vite, très vite et nous présentent quatre morceau sur une durée maximale de dix minutes seulement. Quatre morceaux où seul l’énergie et la fougue prévalent. On apprécie la spontanéité des interprétations et l’humour qui semble parer leur propos. Il apparait tout de même que, sous le ton humoristique apparent, la gravité demeure. L’ensemble est bref, brut de décoffrage surtout, mais sans pastiche.

Dakiniz se présente comme un trio évoluant dans l’ornière du Noise et Garage –Rock, force est de constater qu’il n’y a nullement tromperie sur la marchandise. Les amateurs du genre, l’auditeur à la recherche d’une découverte impromptue ou encore ceux ayant besoin de se décrasser les cages à miel apprécieront !

Nul doute que cet ensemble de titres gagne en envergure lors des prestations du trio qui, ces dernier temps, se produit beaucoup, enchainant les concerts en compagnie du groupe Dead Penguins Sporting Club notamment. Dakiniz devrait très bientôt retrouver le chemin des studios pour finaliser de nouveaux titres, préludes à un premier album studio assurément produit par Laurent Ciron. Les morceaux existants eux seront bientôt à redécouvrir au travers de pendants vidéo, des clips étant en effet en préparation. En les attendant, on peut toujours se réserver un petit quart d’heure pour l’écoute de Spontaneous Human Combustion With French Fries ! 

Concluons notre tour d’horizon de ce Spontaneous Human Combustion With French Fries  par une phrase de Michel Polnareff, phrase qui, ici, fait singulièrement écho aux propos tenus par son chanteur et semble parfaitement résumer et qualifier le travail accompli par Dakiniz avec cet EP :

Si l'on vous demande pourquoi cet enregistrement […] n'est pas un modèle de perfection technique, répondez que, souvent, la sincérité est préférable à la qualité »[4].

Liste des titres :

1.      I Will Probably Sell My Organs On Facebook
2.      Daddy Is A Girl
3.      Same Face Same Process
4.      Life Is Banana

Dakiniz, Spontaneous Human Combustion With French Fries, 2014.

Publié le : 28/10/2014 par La Gazette De Paris


Xavier Fluet @GazetteDeParis





[1] Site officiel de Dakiniz, section « About ». Lien : http://www.dakiniz.com/
[2] Page  Bandcamp de Dakiniz, section « EP ». Lien : http://dakiniz.bandcamp.com/album/ep
[3] Ibid. section « Spontaneous Human Combustion With French Fries, ». Lien : http://dakiniz.bandcamp.com/album/spontaneous-human-combustion-with-french-fries
[4]  Michel Polnareff, Polnarevolution, Disc AZ, Novembre 1972. Extrait du texte intérieur de la pochette  33T.

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